Au cours de l’histoire, plusieurs villes se sont illustrées par leur production de tapisseries. Il est parfois difficile pour les chercheurs de rattacher une pièce à un lieu de production, même si le style et les marques d’atelier, parfois présentes dans les bordures, délivrent des pistes d’identification.
À la fin du Moyen Âge, les Flandres dominent la production européenne. La proximité avec l’Angleterre facilite l’approvisionnement en laine. Depuis longtemps tournées vers l’industrie drapière, les villes d’Arras, Tournai, Bruges et Bruxelles se spécialisent dans la tapisserie. Dans la seconde moitié XVe siècle, Bruxelles élabore un style nouveau en associant étroitement les peintres à la création de cartons. La supériorité des lissiers bruxellois est reconnue et tout au long du XVIe siècle, les cours européennes se fournissent auprès d’eux.
Le couronnement de Clovis, détail, tenture de l’Histoire de Clovis, tissée à Arras au XVe siècle. Palais du Tau, Reims.
Photo : Pascal Lemaître / Centre des monuments nationaux
Au XVIIe siècle, le pouvoir royal cherche à concurrencer la production des Flandres en faisant venir des lissiers flamands à Paris. Leur savoir-faire, associé aux cartons des peintres parisiens, va contribuer au succès des manufactures françaises.
Au début du XVIIe siècle, Henri IV installe dans le faubourg Saint-Marcel, sur le site des Gobelins, les lissiers qu’il a fait venir des Flandres. Mais la création officielle de la Manufacture des Gobelins n’intervient que sous le règne de Louis XIV. En 1662, le ministre Colbert établit l’institution dont le rôle est de produire des tapisseries pour le roi. Celles-ci sont destinées à meubler les résidences royales et à servir de cadeaux diplomatiques. La manufacture est dirigée par Le Brun, qui fournit les cartons de tentures destinées à devenir célèbres, comme L’Histoire d’Alexandre ou L’Histoire du Roi.
Portière aux armes de Colbert, tapisserie d’après Le Brun, tissée au Gobelin, troisième quart du XVIIe siècle. Château de Châteaudun.
Photo : Jean-Luc Paillé / Centre des monuments nationaux
Pour répondre aux demandes de particuliers, qui ne pouvaient pas commander à la Manufacture des Gobelins, réservée à l’usage du roi, Colbert fonde en 1664 la manufacture de Beauvais. Cette dernière connaît son apogée au XVIIIe siècle grâce aux modèles de tentures fournis par Jean-Baptiste Oudry et François Boucher.
Aujourd’hui, les manufactures de Beauvais et des Gobelins sont rattachées au Mobilier national. Elles produisent chaque année une dizaine de tapisseries d’après des artistes contemporains, contribuant à la conservation d’un savoir-faire d’excellence et à la vitalité de la création.
Le prince en voyage, pièce de la tenture de l’empereur de Chine, tissée à la Manufacture de Beauvais d’après Jean-Baptiste Monnoyer, début XVIIIe siècle. Château de Champs-sur-Marne.
Photo : Pascal Lemaître / Centre des monuments nationaux
La cité d’Aubusson, située dans le Massif Central, se tourne dès le XIVe siècle vers la production de tapisserie. L’abondance des élevages de mouton dans la proche région favorise cette industrie. La production est fortement influencée par le modèle flamand et les lissiers d’Aubusson commercialisent essentiellement des verdures et des scènes de chasse.
En 1665, Colbert accorde aux lissiers d’Aubusson le titre de manufacture royale. Le peintre parisien, Isaac Moillon, fournit alors à Aubusson un nombre très important de modèles originaux. La tapisserie d’Aubusson connaît un âge d’or au XVIIIe siècle en produisant des pièces d’après Jean-Baptiste Oudry, François Boucher et Jean-Baptiste Huet.
Inscrite au patrimoine culturel immatériel de l’Humanité depuis 2009, la tapisserie d’Aubusson est mise en valeur par la cité de la tapisserie.
Cléopâtre et Antoine, pièce de la tenture des Femmes illustres de l’Antiquité, tissée à Aubusson d’après Charles Poërson ou Michel Corneille, seconde moitié du XVIIIe siècle. Château de Cadillac.
Photo : Caroline Rose / Centre des monuments nationaux